"Elvis" : la folie des grandeurs au cœur d’un biopic
Réalisé par Baz Luhrmann et sorti dès ce mercredi 22 juin en salles, ce biopic de 2h29 dépeint une Amérique divisée, submergée par la grandiloquence dont un homme est la pleine incarnation : Elvis Presley.

"Je suis l’homme qui a donné Elvis Presley au monde". Les premières paroles du film sont claires : Tom Parker, le célèbre impresario du King et grand méchant de l’histoire, va nous raconter la vie du plus grand chanteur des États-Unis. À l’avant-première du Grand Rex de Paris, les spectateurs semblaient attendre "Elvis" depuis des mois. Certains, lunettes du chanteur au nez, applaudissent dès cette première phrase. Baz Luhrmann, le réalisateur, décide d’ailleurs de débuter le film par Las Vegas. Pas de Memphis, de Tennessee, pas de jeunesse racontée tendrement… C’est Las Vegas. La splendeur, la grandiloquence, le kitch, le clinquant : bref, l’Amérique des années rock. Elvis, c’est ça. Elvis, c’est celui qui mérite le biopic des biopics. Dès les premières images du long-métrage, les yeux ne savent plus où regarder. Des paillettes, du show, des décors époustouflants, le tout astucieusement réuni par les mélodies d’Elvis. Le réalisateur nous balance presque en pleine face toute la frénésie autour de la vedette. À travers de nombreux split screen (écran divisé en plusieurs images), on comprend rapidement que le chanteur sera évoqué sous tous ses angles. Et avec Baz Luhrmann, on pouvait s’y attendre. Ce film est un parfait mélange des œuvres cinématographiques du réalisateur : le musical de "Moulin Rouge", la romance de "Roméo + Juliette", le grandiose de "Gatsby le magnifique"… Tout y est.
Le Showman et le Snowman
Elvis, c’est le sincère, l’artiste, celui qui se nourrit intégralement de l’amour du public. En d’autres termes, c’est un showman. Le colonel Tom Parker, c’est l’escroc, le truand, le méchant… le roi de l’entourloupe. Celui que tout le monde surnomme… Le Snowman. Cependant, une fois ces portraits dressés, Buz Luhrmann fait naître de ces deux personnages une dualité presque troublante. Elvis Presley est incarné par Austin Butler, transcendant de profondeur et de réalisme. Tom Parker, lui, est brillamment interprété par un Tom Hanks plein de nuances, dont le CV n’est plus à vendre. Portés par des costumes splendides (réalisés par Catherine Miran, en collaboration avec Miu Miu et Prada), les acteurs parviennent à exprimer leur attirance vers des forces contraires. Le blues et la country, les Blancs et les Noirs, l’art et le commerce, le show et le business. Et c’est ce même business qui provoque cet affront constant entre les deux hommes. "Nous sommes pris au piège, je ne peux m’en échapper" chantait le King dans "Suspicious Minds". L’un l’a emmené au sommet, l’autre l’a enfermé dans une prison dorée… Et on ne sait pas vraiment à qui ces rôles sont attribués.
Un blanc qui joue du noir
Cette dualité évoquée, elle se transpose au pays tout entier. En utilisant la voix off rétrospective comme narration, les tensions entre le chanteur et son manager sont intimement liées aux contradictions culturelles de l’époque en Amérique. Si le côté "cheveux gominés et maquillage de fille" d’Elvis est poussé à son paroxysme, c’est en réalité afin de mieux mettre en valeur la musique dont il vient : un mélange de la country blanche et du blues noir. Il traîne sur Beale Street, entre rock et gospel, "il a l’esprit en lui" déclare même un révérant. Dans un pays où les lois ségrégationnistes sont à leur apogée, Elvis est dans ce biopic présenté comme le sauveur des États-Unis. Le super-héros… Celui qu’il a toujours voulu être dans son enfance parmi les quartiers afro-américains de Memphis. Si loin d’eux, et pourtant si près. Ce lien intime avec cette culture, expliqué dans un flash-back, va tenir jusqu’à la fin du film. Contre vents et marées, il balayera les pétitions pour interdire ses "trémoussements", il maintiendra sa gestuelle légendaire malgré les menaces d’emprisonnement, il rendra hommage à Martin Luther King et à cette musique dont il incarne presque l’esprit. Pour Baz Luhrmann, la rébellion d’Elvis Presley sur scène, c’est la rébellion de l’Amérique tout entière.
Cette dualité évoquée, elle se transpose au pays tout entier. En utilisant la voix off rétrospective comme narration, les tensions entre le chanteur et son manager sont intimement liées aux contradictions culturelles de l’époque en Amérique. Si le côté "cheveux gominés et maquillage de fille" d’Elvis est poussé à son paroxysme, c’est en réalité afin de mieux mettre en valeur la musique dont il vient : un mélange de la country blanche et du blues noir. Il traîne sur Beale Street, entre rock et gospel, "il a l’esprit en lui" déclare même un révérant. Dans un pays où les lois ségrégationnistes sont à leur apogée, Elvis est dans ce biopic présenté comme le sauveur des États-Unis. Le super-héros… Celui qu’il a toujours voulu être dans son enfance parmi les quartiers afro-américains de Memphis. Si loin d’eux, et pourtant si près. Ce lien intime avec cette culture, expliqué dans un flash-back, va tenir jusqu’à la fin du film. Contre vents et marées, il balayera les pétitions pour interdire ses "trémoussements", il maintiendra sa gestuelle légendaire malgré les menaces d’emprisonnement, il rendra hommage à Martin Luther King et à cette musique dont il incarne presque l’esprit. Pour Baz Luhrmann, la rébellion d’Elvis Presley sur scène, c’est la rébellion de l’Amérique tout entière.
Laura Sonilhac
Le 22/06/2022